Il y a cinquante-cinq ans, Enzo Ferrari découvre la Jaguar Type E pour la première fois et déclare : C’est la plus belle voiture de tous les temps ! Une phrase emblématique, citée par un industriel qui est lui aussi à l’origine de bon nombre de coupés mythiques.
La Jaguar Type E a été un succès instantané et durable, avec 70.000 exemplaires vendus en quatorze ans. Ses proportions parfaites, son allure à la fois sportive et élégante, la pureté de ses lignes sont autant d’éléments qui ont poussé le Musée d’art moderne de New York à exhiber le modèle dans sa collection permanente. Brigitte Bardot, Steve McQueen, Tony Curtis ou encore George Best, tous ont roulé en Type E, faisant du coupé britannique une icône des années 60, au même titre que les Beatles ou la minijupe.
Produit de 1961 à 1975, le modèle a permis à Jaguar de se forger une image de constructeur d’exception, d’autant que la Type E a été la première voiture sportive à être produite en série. La Jaguar XJ-S, qui a pris le relais de la Type de septembre 1975 à 1996, est apparue en pleine crise pétrolière et a beaucoup été critiquée pour son design particulier. Du coup, elle a eu beaucoup de mal à se faire une place sur le marché et ce même si elle a tout de même été produite à quelque 113.000 exemplaires.
Après plus de quinze années de vaches maigres, Jaguar, désormais propriété du groupe indien Tata, est revenu sur le marché avec un modèle sportif digne de ce nom : le coupé Type F. Un bolide, décliné en cabriolet et en coupé, à même de tailler des croupières aux Porsche 911 et autres Mercedes AMG GT. À ce titre, il est du coup considéré comme le digne héritier de la Jaguar Type E. Un titre usurpé ?
Confronter ces deux reines de beauté, que quarante-cinq années séparent, permet de réaliser que les canons stylistiques de 1961 sont loin de ceux d’aujourd’hui. La Type E, très basse, exhibe un interminable capot et des formes fuselées, d’une sobriété remarquable. La Type F elle, est plus haute et un rien plus longue, proposant des cotes comparables à celles d’une Porsche 911. Pure et délicieusement vintage, la Type E fait face à un coupé contemporain, riche en détails high-tech et qui n’a franchement rien à envier aux dernières Aston Martin.
Une fois à bord, par contre, c’est le jour et la nuit. La Type E accueille ses deux passagers dans un habitacle cossu mais étriqué. Une fois installé dans l’un des deux petits sièges baquets recouverts de cuir noir, un délicieux parfum monte aux narines, mariant l’odeur du cuir, de l’essence, de l’huile et du bois. Les fesses au ras du sol, la route se sent, la route se vit, le tout auréolé du chant délicieux du six cylindres en ligne.
Au cœur de la Type F, on accède à un tout autre univers. Cet habitacle du XXIe siècle adopte certes la sobriété de son aïeule, la console centrale héritant de quelques touches chromées, tandis que la planche de bord propose une instrumentation particulièrement ergonomique, dominée par un large écran interactif. Mais les boiseries sont passées à la trappe au profit de matériaux synthétiques nettement moins charmants. Par contre, lors d’échappées estivales, la Type F a l’avantage de proposer une climatisation diablement efficace, là ou la Type E a vite tendance à se transformer en four, son six cylindres n’hésitant pas à partager sa libido.
Une fois lancée, la vénérable Type E n’a franchement pas à rougir face à sa descendance. Son superbe six cylindres en ligne de 4.235 cc développe une puissance de 265 ch pour un couple de 383 Nm. Des valeurs remarquables pour l’époque. Associé à une boîte manuelle à 4 rapports, elle passe le 0 à 100 km/h en 7 secondes et flirte aisément avec les 240 km/h. La Type F peut pour sa part compter sur un V6 (un V8 est également disponible), suralimenté dans ce cas, qui génère 340 ch et qui est accouplé à une boîte automatique à 8 rapports. De quoi pulvériser le 0 à 100 km/h en 5,3 secondes et d’atteindre une vitesse de 260 km/h !
La nouvelle Jaguar Type F Coupé est disponible à partir de 66.250 € (73.350 € en cabriolet). Une Type E en parfait état peut être trouvée à partir de 50.000 € !
Merci à Laurent Dormont et à Patrimonial Advice pour leur aide dans la réalisation de ce reportage.