Le M Museum de Louvain propose la première grande expo européenne consacrée à l’Américaine Sarah Morris. Des peintures et des films pour se plonger dans une expérience immersive de la ville.
La ville comme terrain de vie, terrain de pouvoir et de paraître, ou comme rébus ésotérique. Toutes ces approches se retrouvent dans le travail de Sarah Morris, peintre et cinéaste américaine qui fait l’objet d’une première exposition monographique européenne au M museum de Louvain. Minimalistes et abstraits, ses tableaux agencent des motifs structurés et aux couleurs pop. Amples et chatoyants, ses films ne sont ni des documentaires, ni des fictions, mais plutôt des portraits impressionnistes de villes ou d’événements.
Formée à la peinture comme aux sciences politiques et à la philosophie, Sarah Morris a toujours considéré l’art comme une œuvre globale. L’art auquel je suis sensible rassemble la politique, l’entertainment, l’architecture, le design graphique et le journalisme dans une étrange alchimie qu’on ne peut plus appeler réalité bien qu’elle s’en inspire. La peinture et les films sont comme deux faces d’une même pièce qui coexistent dans mon travail. Les films me sont nécessaires pour produire les tableaux et vice-versa.
Les formes géométriques, les droites, les courbes qui composent les toiles de Sarah Morris sont comme un alphabet codé inspiré de motifs urbains et d’éléments architecturaux, de plans de pliage pour des origamis ou même de banals accessoires de bureau comme des trombones. Le regard glisse sur les tableaux couverts de plusieurs couches de laque brillante pour bâtiment et on se met à chercher, comme elle, à décrypter une vérité cachée derrière l’agencement anarchique des villes modernes ou des objets les plus quotidiens.
Projetés sur un écran cinéma, les films offrent une expérience immersive. Quand je commence à tourner, je n’ai pas de scénario, j’ai ce que j’appelle ma « liste de courses » où j’indique des lieux, des situations et des actions que j’ai envie de filmer. Ensuite tout peut arriver. L’absence de dialogues et de sons directs, la précision du montage et la qualité du cadrage comme de l’univers chromatique confèrent à ces images une fluidité hypnotique qui composent un portrait décalé de villes-mondes ou de grands événements.
En filmant la préparation de la fête d’ouverture des jeux Olympiques de Pékin en 2008, Sarah Morris capte la mutation de la ville comme un organisme vivant où des architectes construisent, des athlètes bandent leurs muscles, des réceptionnistes contrôlent leur écran, où de l’argent change de mains, où des bouches se nourrissent et des oies sont élevés à la ferme. Fascinée par les liens du pouvoir et par leur capacité de transformer les choses, Morris assemble son fascinant puzzle d’images en équilibre sur le pouls d’une musique electro lumineuse.
Sarah Morrisinfos pratiques
Dans Strange Magic, réalisé à la demande du groupe LVMH, elle filme le Paris du luxe. Ses images créant des liens formels et des échanges de fluides entre la mise en bouteille du parfum, l’embouteillage du Champagne et le musée dessiné par Frank Gehry dans le Bois de Boulogne. Je suis très contente de ces images, elles capturent parfaitement l’atmosphère de la ville. C’est comme de la chimie organique. Il y a aussi un côté médiéval qui émerge des vieux murs ou de la séquences des prostituées au Bois de Boulogne. C’est incroyablement médiéval de faire du bois son lieu de commerce.