Le resto
Il faudrait un jour écrire l’allégresse toute romantique ressentie à arpenter un chemin étroit conduisant à une ancienne bâtisse éclairée dans la nuit. Souvenirs lointains des chaumières ou des auberges d’antan ? Nostalgie des longs voyages harassants et périlleux remplis de péripéties, de contretemps et de détours ?
Quoi qu’il en soit, c’est donc près d’un étang, à Kraainem, dans un endroit qui rappelle des temps où l’harmonie originelle entre l’homme et la nature était accomplie que Maxime Colin a établi ses fourneaux et qu’il écrit, petit à petit, sa symphonie pastorale. Se souvient-on d’ailleurs que l’oeuvre fameuse de Beethoven était sous-titrée « Souvenir de la vie rustique, plutôt émotion exprimée que peinture descriptive » ? On croit pénétrer ici dans un écrin de nature à qui l’homme demande des sentiments et non des explications.
Le sourire accueillant de la sommelière, qui saura vous guider durant tout le repas avec justesse, constitue une ouverture gracieuse à cet andante gourmand. Sur la table repose une simple bougie. La décoration est épurée. La simplicité règne, un certain silence aussi. Place aux états d’âme et aux paysages culinaires du jeune chef. La mise en bouche, portée par quelques bulles de champagne, se compose d’un fin biscuit breton au parmesan sur lequel s’est déposé un nuage crémeux d’olive et d’anchois. C’est ensuite, dans un bol élégant, qu’un tartare de bar, agrémenté de graines de sarrasin et d’un onctueux gaspacho d’huître, ose la comparaison avec l’estampe japonaise. Le tourteau qui suit se cache entre deux tranches de daikon, surmontées d’une pointe de gelée de pomme verte au wazabi. Les algues nori donnent à l’ensemble des ondulations marines. Pour la seconde entrée, c’est un dos de Skrei rôti garni d’un beurre au champagne et d’un caviar Avruga. Vient ensuite l’hallali : un pigeonneau, parfaitement cuit, avec ses cuisses confites bien rouges, sa purée d’artichaut et son cromesquis comme une bille remplie de secrets gustatifs. L’association est bien pensée et les saveurs s’accordent naturellement. Après une jolie assiette-ardoise de quelques fromages qui équilibrent le repas et préparent au dernier envol, le dessert vient se construire autour de l’ananas pointant au travers d’un crumble de coco, d’une glace vanille et d’une infusion de menthe d’où s’échappent quelques fraîcheurs matinales. Etrange paradoxe : il fait maintenant complètement nuit. Le plus difficile est de partir. L’équipe au complet vous salue et semble vous souhaiter « bon voyage ». Dehors, après avoir marché quelques mètres d’un pas fébrile, vous vous étonnez de ne pas retrouver votre cheval aux abords de l’étang.
L’adresse
Restaurant Maxime Colin,1, Pastoorkesweg, 1950 Kraainem. T. +32 (0) 2.720.63.46 www.maximecolin.be Fermeture le samedi midi, le dimanche soir et le lundi.
Le chef
Maxime Colin est un jeune espoir, déjà confirmé, de la gastronomie belge puisqu’il avait, à La Villa Lorraine, brillamment réussi à maintenir l’étoile décrochée au Michelin par Alain Bianchin. En outre, il a été primé par le Gault&Millau, Jeune Chef de l’Année 2016 pour Bruxelles. Dans ce nouveau projet, il s’associe avec son frère, Gaetan Colin, qui jusqu’ici exploitait le lieu en tant que brasserie sous le nom D’Oude Pastorie. L’objectif est donc clairement d’effectuer un virage gastronomique.
Sa recommandation
Je recommande le paté en croûte de David Martin et Karen Torosyan de la brasserie Bozar
Bozar Brasserie, Palais des Beaux-Arts, 3, rue Baron Horta, 1000 Bruxelles
Ouvert du mardi au samedi, midi et soir. T. +32 (0) 2.503.00.00, bozarbrasserie.be