Art et design : l’érotisme peut-il être une source d’inspiration ? Certains créateurs réussissent le pari de marier érotisme ou plus si affinités, et arts appliqués. Le tout sans tomber dans la vulgarité, mais non sans de troublants effets secondaires. Bienvenue dans le monde torride du design suggestif.
Sexe et design, même combat ?
Tous deux partagent en tout cas en commun le fait d’être à la fois un langage unique et universel, ancrés dans l’esprit, mais aussi dans le corps et la matière. Nouveaux et intemporels à la fois. On ne s’étonnera donc pas que les designers aient fini par aller chercher leur inspiration parfois bien en dessous de la ceinture. Le monde de la création artistique n’a d’ailleurs pas attendu le XXIe siècle pour s’emparer de nos fantasmes les plus chauds. Qu’on pense à l’Art Nouveau par exemple, et son ode à la femme et aux courbes sensuelles. Que l’on pense aussi au canapé Boca, créé par Salvador Dalí en 1930, et inspiré de la bouche de la pulpeuse actrice américaine Mae West. Ou encore au fameux vase-pénis Shiva d’Ettore Sottsass, conçu dès 1971. Mais le mouvement semble s’accélérer ces dernières années sous l’impulsion de nouvelles générations de créateurs enfin décomplexés. Le genre acquiert même ses lettres de noblesse jusqu’à devenir la thématique principale de grandes vitrines du design contemporain et de certaines galeries en vogue. En 2009, vingt stylistes exposaient ainsi leurs objets coquins à la foire de Milan, le plus grand salon de l’ameublement au monde. En 2012, le Triennale Design Museum de Milan, LE musée du design italien, ouvrait quant à lui ses portes à une grande exposition interrogeant la place du sexe dans les objets du quotidien, d’hier à aujourd’hui. Baptisé Kama, sex and design, une demi-douzaine de créateurs internationaux avaient là aussi été invités pour y exposer leurs vision du design interdit aux moins de 18 ans.
Lampe de chevet godemiché !
Certaines créations contemporaines mêlant sexe et arts brillent plus par leurs aspects esthétiques ou conceptuels. C’est le cas de la très phallique nature morte Still Life, de David Baskin (2007), composée de vieux flacons de produits cosmétiques détournés. Ou encore de la chaise à bascule Pony Girl Rocker, de Peter Jakubik (2011). Mais d’autres optent résolument pour des aspects nettement plus pratiques voir utilitaires. Dans cette catégorie, on peut ranger la série des bibelots sexuels de Matteo Cibic, dont une lampe de chevet (ou son équivalent aquarium). A priori tout à fait innocente, elle cache pourtant dans son pied de quoi le prendre à toute heure du jour ou de la nuit, à savoir un sympathique godemiché à ventouse des plus colorés ! Dans la même veine, on peut mentionner les créations Powered by Jimmyjane de l’Israélien Arik Lévy, qui hébergent dans un orifice intelligemment situé, un ou plusieurs élégants petits vibromasseurs en métal. Classe et bien pensée à la fois ! L’idée étant, aux dires de son créateur, de transformer les objets – ici, une jarre de bois – pour en faire un vibromasseur à usage externe qui permet une interaction d’un genre totalement nouveau. On veut bien le croire sur parole !
Sextoys, la révolution du design
En matière d’alliance objective entre forme et fonction justement, certaines frontières qu’on aurait pu penser intangibles, pudeur oblige, ont depuis peu aussi été franchies par les créateurs. Lesquelles ? Mais celles des sextoys bien sûr ! Un domaine où, depuis quelques années, les incursions des stylistes de la forme se font de plus en plus nombreuses et remarquées ! Avec parfois des récompenses internationales à l’appui. En 2010, une médaille d’argent à l’International Design Excellence Awards, récompense les jouets coquins du brillant concepteur d’origine suisse, Yves Béhar. S’il y a d’ailleurs bien des objets qui doivent être pensés et dessinés en fonction de l’usage que l’on doit en faire, ce sont bien les jouets intimes. Étonnant que l’on n’y ait pas pensé plus tôt. Mais bref, aujourd’hui, les designers s’en donnent à cœur joie. Cela va de Matali Crasset, la Jeanne d’Arc du design, à qui l’on doit un jouet érotique baptisé 8e ciel spécialement étudié pour sa prise en main, au designer espagnol Discoh, créateur d’un sexte inspiré de l’alœ vera, en passant par le Suédois Éric Kalén que certains décrivent comme le Philippe Starck du vibromasseur ! Après avoir travaillé comme concepteur pour la firme Lelo, un des leaders dans le domaine des love toys de luxe, l’homme a fondé sa propre société, Tickler. Avec celle-ci, il a imaginé tout un univers de jouets coquins au look frais et désopilant.
Armoires sexy
La conception de meubles n’est pas épargnée par cette tendance. Le sculpteur néerlandais Mario Philippona, et sa société Sexyfurniture, s’est par exemple inspiré des formes féminines, les plus attrayantes qui soient dans la nature selon lui, pour concevoir une collection de meubles pour le moins suggestifs : armoire murale en forme d’altière poitrine, tables dont les pieds sont formés de sculpturales croupes et jambes, coupe à fruits en forme de seins (Tittty-fruity), garde-robe haut-talons et on en passe. Les meubles de Mario sont réalisés à la main, en bois d’essences européennes, finis à l’huile naturelle et s’avèrent à la fois sexy et fonctionnels.
Le kamasoutra avec des ballons !
Faire rimer sexe et design n’empêche pas l’humour, bien au contraire. En témoigne par exemple le travail du graphiste russe Anton Lobachev. Spécialiste de l’animation en 3D, il a créé en 2010 une série de personnages animés très drôles, dont la caractéristique est d’être constitués de ballons de clown, évoluant sur le thème du… kamasoutra. Si on n’en tire pas nécessairement des idées de nouvelles positions torrides, on apprécie le côté décalé de son travail. Dans un genre différent, Julian Murphy et son Tantric Pop Art, prouve qu’on peut manier ironie, allusions érotiques et réflexion artistique. De réflexion, il en est justement question dans ses œuvres, des dessins peints à la main, mariant gouache et air Brush. Ils flirtent agréablement avec un certain fétichisme. Julian Murphy part en effet du principe que l’érotisme commence avant tout dans le cerveau ! Accessoirement, l’homme est aussi l’ancien Senior Art Director du World Erotic Art Museum de Miami Beach et le créateur d’Erotic Signature, qui fut le plus grand concours d’art érotique contemporain au monde. C’est dire s’il en connaît en rayon sur les échanges stimulants entre l’art et le cochon qui sommeille en nous tous !
Darth Vador sous la couette !
Les jouets intimes n’en finissent pas de susciter l’imagination des artistes en tous genres. En 2013, le graphiste hongrois Balázs Sármai s’est emparé de l’idée pour la décliner à sa manière. Le résultat ? Des vibrateurs et godemichés dont la forme s’inspirait de six des plus grands super-héros américains, Captain America, Black Widow, Hulk, Thor, Iron Man et Hawkeye, aussi connus sous le nom d’Avengers. Peu après, il récidivait en s’inspirant des jouets intimes de la marque Lelo pour imaginer cette foisi des sextoys Star Wars ! De son imagination sont ainsi nés le « Lord Vader Force power vibrator », le « Stormtrooper couples Massager » ou encore le « C-3PO G-spot vibrator ». Seul bémol, ces supers sextoys n’existent pour l’instant que de manière virtuelle. C’est donc raté pour l’orgasme galactique !
Pour esthètes curieux et un peu coquins
https://www.olybop.fr/lart-erotique-de-julian-murphy/
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Retrouvez toutes les semaines la rubrique MetroBoulotSexo, un regard espiègle et toujours bien documenté sur ce qui se passe généralement sous la ceinture, par Didier Dillen du blog Love,Sexe etc
Illustration TaraM