Chaque vendredi, Anouk Van Gestel repère le meilleur des sorties littéraires, relie les genres, réveille les classiques oubliés, partage ses trouvailles insolites et ses rencontres d’auteurs, d’ici ou d’ailleurs.
Un mois et plus de confinement. Les librairies sont toujours fermées et les sorties des éditeurs reportées à plus tard. Que lire ? J’ai pioché dans ma bibliothèque 3 livres fétiches. Pour les relire. Et vous, quels sont les 3 livres que vous aimeriez nous recommander ? Nous vous donnons rendez-vous sur la page Facebook de Bazar /BazarMagazinBazar/ pour partager vos grands moments de lecture.
La conjuration des imbéciles, un drame hilarant
Un livre culte. Déjà parce que l’histoire de l’auteur, John Kennedy Toole, est un roman en soi. L’auteur s’est suicidé à 32 ans, après avoir essuyé le refus de nombreuses maisons d’édition. Sa mère, en honneur a sa mémoire, n’a eu de cesse de le faire éditer. Finalement, elle envoie le manuscrit à un professeur de littérature qui, touché par son mot d’introduction, lui promet de le lire. Walter Percy : S’il y avait une chose au monde qui ne me disait rien du tout, c’était justement ça : avoir affaire à la mère d’un romancier mort et, pis encore, avoir à lire un manuscrit dont elle disait qu’il était « exceptionnel » et qui se révèlerait être un gribouillis infâme, à peine lisible. Le livre l’a laissé totalement incrédule : Il n’était pas possible qu’il soit aussi bon. Un an plus tard, la conjuration des imbéciles est publié et sera couronné, en 1981, par le prestigieux prix Pulitzer. Il raconte l’histoire d’un personnage odieux, obèse, hypocondriaque et inadapté social. Ignatius Reilly vit toujours chez sa mère, dans un taudis de la Nouvelle Orléans, avec laquelle il entretient une relation des plus étranges. Contraint de trouver un travail, il part à la rencontre de personnages déjantés et de situations cocasses. Ce livre, écrit en 1969, n’a rien perdu de sa causticité, entre gigantesque farce et drame social, il raconte le cauchemar américain avec un humour noir absolument hilarant.
La conjuration des imbéciles, John Kennedy Toole, 10/18 éditions, 9,60 €
Au revoir la-haut, les gueules cassées et l’après guerre de 14
Prix Goncourt en 1913, Au revoir là-haut contient tout ce que l’on aime dans un roman : de l’histoire, des personnages attachants, du suspense et de l’humour. Noir, l’humour, mais jubilatoire. Deux jeunes poilus, Edouard et Albert, se retrouvent quasi à la fin de la guerre, témoins d’un acte criminel. Edouard sauve Albert de la mort et se prend un éclat d’obus qui le défigure. Il devient une gueule cassée, avec tout ce que cela comporte comme douleurs physique et morale, sans compter le rejet et leur difficulté à retrouver une place dans la société. Ils imaginent alors une escroquerie de grande ampleur contre l’Etat. 563 pages qui en mettent plein la gueule !
Au revoir là-haut, Pierre Lemaître, Livre de Poche éditions, 8,70 €
Le joueur d’échecs, le dernier livre de Stefan Zweig
Le dernier roman de Stefan Zweig, écrit avant son suicide et publié à titre posthume. Un récit court qui parle d’une partie d’échecs se jouant sur un paquebot entre un champion mondial imbattable mais fort antipathique, et un illustre inconnu qui va finir par le battre. A plusieurs reprises, même. En parallèle, l’inconnu se livre au narrateur et aborde l’oppression de l’Allemagne nazie, les tortures dont il a été victime et comment un livre sur les plus grandes parties d’échecs lui a permis de ne pas devenir fou alors qu’il était prisonnier, isolé seul dans une geôle. Un petit livre, mais assurément un grand roman.
Le joueur d’échecs, Stefan Zweig, Livre de Poche éditions, 3 €