Derrière un nom de poisson se cache le premier album en solitaire du guitariste Mocke, qui nous livre une musique aquatique où la poésie le dispute à l’humour derrière une fausse désinvolture.
Le pouvoir de l’instrument
L’habitude pousse à considérer la musique instrumentale comme un agréable bruit de fond, propice à une écoute distraite et relaxante. La présence d’une voix sur un morceau donne parfois l’impression d’apporter une consistance, une émotion supplémentaires voire même ce je-ne-sais-quoi qui nous émeut en profondeur et qu’on attribue à la puissance vocale. Le premier album solo de Mocke est là pour faire tomber les préjugés et rappeler le pouvoir évocateur d’une simplicité feinte.
Un groupe à lui tout seul
Outre sa participation à plusieurs formations de la scène pop française indépendante, c’est principalement par Holden – le groupe qu’il a créé avec Armelle Pioline en 1997 – que le guitariste Dominique Dépret s’est fait connaître du public français et étranger. Son jeu subtil oscillant entre acoustique et électronique a largement convaincu et il aura fallu attendre 2014 pour qu’il délivre à ses fans un album en solo.
Drôle de poisson
« L’Anguille », paru en automne dernier, réunit quatorze pistes qui entraînent l’auditeur dans l’embarcation du musicien. Comme un voyage en bateau à travers les cultures et les imaginaires, les morceaux se succèdent avec fluidité. Derrière une apparente légèreté – les titres tels que « Le légume mésopotamien » et « Poisson chat-frit » évoquent une étrange bande dessinée à tendance hallucinatoire – on découvre une musique à la fois sensible et exigeante. Rappelant tour à tour des sons du Velvet Underground, d’un générique vacancier de « Bob L’Éponge » et de musique japonisante contemporaine, la guitare de Mocke paraît autant familière que fuyante.
Comme le disait George Sand, La simplicité est le dernier effort du génie. Pour s’en convaincre, on écoute paisiblement « Hanks Williams s’adresse à la nation Américaine ». Et on a soudainement envie de suivre ce mystérieux poisson qui nous échappe tout en nous attirant dans son sillage.
L’Anguille de Mocke, L’Objet Disque, 14 titres,16 €, http://objetdisque.bandcamp.com/album/mocke-languille-objet004