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Bastien Vives
Quatorze juillet, (c) Bastien Vives / Casterman
Bastien Vives
Quatorze juillet, (c) Bastien Vives / Casterman
Bastien Vives
Quatorze juillet, (c) Bastien Vives / Casterman

BD
Dans les yeux
d’un gendarme

Gilles Bechet -

Avec Quatorze Juillet, l’insaisissable conteur de la BD contemporaine, Bastien Vivès nous offre un thriller social nerveux qui capte avec justesse l’état de sourde menace qui traverse nos sociétés occidentales.

 

Roman noir

S’il était musicien, Bastien Vivès serait multi-instrumentiste. Passant d’un genre à un autre avec un égal bonheur, le péplum métaphysique avec Pour l’Empire, le manga avec Lastman, le drame intimiste avec Une Sœur ou l’érotisme avec Le chemisier, l’auteur dessinateur n’avait pas encore arpenté les banlieues du roman noir. C’est chose faite avec Quatorze juillet. Pour le coup, il s’est adjoint les services du romancier et documentariste Martin Quenehen.

Profondément humains

Ce nouveau roman graphique nous plonge dans un petit village au pied du Vercors, loin de l’agitation des villes mais pas de la société avec un trio de personnages profondément humains. Jimmy un jeune policier affecté par la mort brutale de son père et qui prépare son examen d’officier, Vincent un peintre parisien qui cherche à surmonter la mort de sa femme victime d’un attentat islamiste, et puis Lisa, la jeune fille adolescente en dérive.

Minimalisme photographique

L’intrigue prend place dans la France engourdie par la menace terroriste, engendrant son lot de méfiance et de paranoïa alors que les forces de l’ordre sont sur le qui-vive dans l’imminence des festivités du quatorze juillet. Avec son minimalisme photographique en noir, blanc et gris, Vivès est en prise directe avec l’actualité et avec le style nerveux des séries policières. En maître du cadrage et du découpage, il joue avec le temps et les ellipses pour faire avancer sa narration à coup d’haletantes séquences sans paroles.

Implacable mécanique

On s’attache rapidement à ces personnages déboussolés, Jimmy le policier, protecteur et borderline, traversé de sentiments et d’émotions contradictoires dans un monde qu’il considère en guerre. Vincent le veuf qui cherche à surmonter la douleur du deuil et le désir de vengeance et Lisa la jeune fille simplement avide d’exister. Sans aucun jugement moral, les auteurs décortiquent les faits et gestes qui conduisent l’implacable mécanique de la violence. En jouant sur les non-dits et la force des images, les auteurs parviennent à mener jusqu’au terme leur intrigue efficace et subtile où les certitudes s’effacent comme la buée sur une vitre.

 

Quatorze juillet, Bastien Vivès – Martin Quenehen, Casterman, 256 pages 2 couleurs, 22 €