Avec son projet PolyMorphosis, Claude Evence Janssens a brodé un patchwork musical qui entremêle musique et voix, jazz, gospel et funk et partitas de Bach dans de lumineuses compositions au groove mélodique et naturel.
Musicien autodidacte aux goûts et tentations éclectiques, Claude Evence Janssens n’est pas de ceux qui réchauffent les plats en proposant toujours la même musique. Après le soundtrack jazz de l’album Instants avec sa formation Close Up 5, il revient avec PolyMorphosis, un nouveau projet qui associe cette fois une formation de jazz nerveuse et veloutée, CLEVJA collective, à un quatuor vocal, le Brussels Vocal Project.
Relecture
Tout au long des 10 titres qui composent cet album s’entrelacent différentes couleurs de jazz, les négro spiritual ou même des Partita de Jean-Sébastien Bach. Une association pas aussi inattendue qu’il n’y paraît quand on pense au concerto d’Aranjuez revu par Miles Davis ou aux rapprochements entre la spiritualité de John Coltrane et celle de Bach.
J’avais toute une série de thèmes personnels que je compose généralement en modal que j’ai associé assez naturellement avec des standards de jazz. C’est pareil pour Bach que je joue régulièrement pour mon plaisir, et sur lesquels j’aime improviser. Je trouvais intéressant de placer toutes ces musiques sur une même grille d’accord pour en proposer une relecture.
Les premières mesures du premier titre Angels to carry me home ont de quoi surprendre à priori. Le classique négro spiritual, témoin de la condition des esclaves dans les champs de coton, arrive en se balançant sur un rythme presque reggae tout en basse batterie bientôt ponctué des ornements des instruments à vent.
Formation serrée
Multi-instrumentiste Claude Evence Janssens fait feu de tous vents en passant du flugelhorn et de la trompette au trombone et aux clarinettes basse et alto qu’il superpose avec parcimonie pour rajouter des touches de couleur. Comme je joue de plusieurs instruments, j’ai voulu me faire plaisir en les jouant tous et en les ajoutant couche par couche. La formation serrée permet à chaque musicien de s’exprimer, la guitare étincelante de Fabrizio Graceffa dans Duke’s Caravan ou A funny girl in a jungle world, et tout au long de l’album, la basse chantante de Frederico Pecoraro et l’infatigable groove rythmique de la batterie de Jérôme Baudart.
Facettes mélodiques
Une fois passé l’effet de douce surprise, l’album déploie toutes ses facettes mélodiques. Claude Evence Janssens y va des ses hommages tantôt au jungle jazz de Duke Ellington, tantôt au cool jazz de Miles Davis ou aux envolées mélodiques de Coltrane.
Les parties vocales qui rassemblent Anu Junnonen, Elsa Grégoire, Leander Moens et François Vaiana interviennent en contrepoint, s’unissent dans la grâce suspendue d’un Kyrie Eleison, dans un gospel réinventé sur le fil d’un flow urbain ou dans un élégiaque Summertime quand ce n’est pas le velours de François Vaiana croonant My Funny Valentine ou Tenderly.
J’avais tout composé pour une voix et puis j’ai eu envie d’en ajouter une deuxième, puis une troisième et une quatrième, ce qui devient très gai. Chaque voix joue en contrepoint avec les autres quand ce n’est pas avec la musique.
Au départ de tous ces ingrédients parfois inattendus, musiciens et chanteurs élaborent une pâte musicale tout en naturel et en rondeur. Elaborées et accessibles, les compositions de PolyMorphosis ont demandé un savant travail de mixage pour qu’une piste n’écrase pas l’autre et arriver comme une évidence de l’oreille.
PolyMorphosis, CLEVJA Collective & Brussels Vocal Project, CD Soond, 10 titres, 54 minutes
Disponible sur BAZAR e-SHOP
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RITUALIS – by C/E/J + 6
Somewhere Anytime – by SAWBONES’ TREE – 2020
Instants – by CLOSE UP 5 – 2017