Chaque vendredi, Anouk Van Gestel repère le meilleur des sorties littéraires, relie les genres, réveille les classiques oubliés, partage ses trouvailles insolites et ses rencontres d’auteurs, d’ici ou d’ailleurs.
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Vous éteindrez vos écrans après avoir lu La Civilisation du poisson rouge
30 minutes ! C’est selon une étude du Journal of Social and Clinical Psychology le temps maximum par jour aux réseaux sociaux et à Internet sans risque pour la santé mentale. Les jeunes américains passent en moyenne 5 heures par jour devant leurs écrans et les jeunes européens, eux, seraient à 3h30 d’écran par jour. Des chiffres en constante augmentation. Du simple divertissement contrôlé on est passé à une addiction incontrôlable orchestrée par les géants du web. Bruno Patino a mené l’enquête et pointe les mécanismes de l’addiction et les raisons pour lesquelles nous en voulons toujours plus. Avec des conséquences pénibles : anxiété, schizophrénie (pour ceux qui jouent avec plusieurs profils, insomnies, nomophobie (peur d’être éloigné de son gsm), phnubbing (consultation irrépressible à tout moment), athazagoraphobie (peur d’être oublié) …
L’extrait
Et, l’homme, donc, annonce que son entreprise a réussi à calculer le temps d’attention réel du poisson. Le fameux « attention span ». Et celui-ci est effectivement dérisoire. L’animal est incapable de fixer son attention au-delà d’un délai de 8 secondes. Après ces 8 petites secondes, il passe à autre chose et remet à zéro son univers mental. Reste que l’homme n’en a pas fini de ses annonces. Les ordinateurs de Google ont également réussi à estimer le temps d’attention de la génération des Millenials. Ceux qui sont nés avec la connexion permanente et ont grandi avec un écran tactile au bout des doigts : 9 secondes !
Entre les lignes
A force de tourner dans nos bocaux numériques, nous devenons des poissons rouges. Avec un temps d’attention réduit à 9 secondes. Un constat sans appel de Bruno Patino, – directeur éditorial d’Arte France et directeur de l’école de journalisme de Science Po, – qui prévient des dommages collatéraux de cette dépendance. Il explique les dangers évidents des réseaux sociaux, celle de l’addiction aux jeux vidéos et démontre comment les empires économiques ont créé une nouvelle servitude. Et aussi pourquoi ce manque d’attention est dangereux parce qu’il détruit nos repères et nous isole peu à peu. Pour conclure, il nous donne des pistes pour changer le cours des choses en suggérant une navigation tempérée sur le Net et ainsi retrouver autonomie et liberté. Facile à lire, bien documenté, un essai qui fait prendre conscience qu’il est grand temps de raccrocher.
La Civilisation du poisson rouge, Bruno Patino, Livre de Poche éditions, 7,90 €.