Chaque semaine, Anouk Van Gestel repère le meilleur des sorties littéraires, relie les genres, réveille les classiques oubliés, partage ses trouvailles insolites et ses rencontres d’auteurs, d’ici ou d’ailleurs.
Jacaranda
L’histoire en trois lignes
Le jacaranda, c’est l’arbre flamboyant aux fleurs mauves dans lequel Stella, douze ans, vient se réfugier, observer sa famille et tenter de comprendre les secrets et les non-dits du génocide rwandais. L’heure est à la cohabitation entre bourreaux et victimes, mais comment vivre ensemble quand le pardon est impossible ? Milan, lui, est métis et a grandi en France. Sa mère ne lui a jamais parlé de son pays. Il le découvre à travers les images du génocide à la télévision. Quand ses parents divorcent, il l’accompagne pour des vacances et découvre sa famille rwandaise dont il n’avait jamais entendu parler et va progressivement apprendre le drame qu’a vécu le peuple rwandais et le difficile chemin pour refaire société. Et construire l’après.
L’extrait
Pendant onze ans, j’ai eu la chance de vivre aux côtés de Rosalie qui m’a transmis l’histoire de ma famille et de mon pays. Elle était ma meilleure amie, ma confidente, mon âme soeur. Avant de s’éteindre paisiblement sur la terre de ses ancêtres, elle m’aura enseigné que l’on ne peut pas comprendre qui on est si l’on ne sait pas d’où l’on vient. Elle est la racine de mon arbre de vie. Elle existe pour toujours sous l’écorce de ma peau. Je t’aime à jamais. Adieu Rosalie.
Pourquoi vous ne le lâcherez pas
Le sujet sous-jacent est terrible : le génocide qui a tué, au printemps 1994, plus de 800 000 Rwandais, principalement des Tutsis. Il faut remonter aux sources du conflit et c’est ce qu’a fait l’auteur. Ce roman se déroule sur 4 générations et délie les fils sacrément emmêlés des secrets, de l’origine et des causes du conflit qui remontent au temps de la colonisation avec une grande part de responsabilité des Belges. Ce n’est pas un roman sur le génocide, mais un livre qui raconte à travers des personnages forts l’espoir de la jeune génération. Elle n’a pas connu les massacres mais elle grandit dans un silence assourdissant. Gaël Faye a connu un succès mondial avec Petit pays en 2016. Jacaranda, son deuxième roman, se lit en passant par toutes les émotions possibles, de l’horreur au bonheur. Un livre lumineux, rythmé, puissant qui se retrouve en lice pour les prix Goncourt, Renaudot et Femina. Verdict en novembre.
Jacaranda, Gaël Fays, Grasset éditions, 20,90 €