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Dans la peau d'une femme mendiante, Fatiha Saidi, La boîte à Pandore éditions, 18,90 €.

Des livres &+
Jé fin, merci

Anouk Van Gestel -

Chaque vendredi, Anouk Van Gestel repère le meilleur des sorties littéraires, relie les genres, réveille les classiques oubliés, partage ses trouvailles insolites et ses rencontres d’auteurs, d’ici ou d’ailleurs.

Vous avez aimé 

Le quai de Ouistreham. Florence Aubenas

Vous serez bouleversé.es par Dans la peau d’une mendiante 

Elle a d’abord préparé son personnage, lu sur la précarité. Puis, un matin, son bonnet enfoncé sur la tête, elle a pris la direction de Namur. Elle a trouvé une petite place dans une rue avec du passage, aux alentours de la gare, s’est assise par terre et a tenu sa pancarte à deux mains : jé fin, merci. Elle raconte sa peur, l’indifférence et la méchanceté. Mais aussi les petits gestes qui réconfortent et la solidarité.

L’extrait  

L’un des premiers obstacles rencontrés dans la rue fut le regard des autres, craint davantage par une apparence peu flatteuse sous des vêtements élimés, des chaussures en fin de vie et un bonnet de laine porté sous un soleil encore vigoureux. À ces dehors misérables, il faut ajouter la position occupée sur l’espace public, avec le sentiment d’infériorité et d’exclusion, comme explicité plus loin dans le cadre de la mésestime de soi. La plus grande part des regards perçus contenait de l’hostilité, du mépris ou de l’indifférence.

Entre les lignes

Parler des pauvres quand on est bien au chaud chez soi est une option louable, mais confortable. Ce n’est pas celle choisie par Fatiha Saidi pour ce récit. Non, l’ex-sénatrice belgo-marocaine, a décidé de se mettre en scène pour une plongée in situ dans le monde de la précarité. Quelques jours passés dans le dénuement et sous le regard des autres. Un témoignage qui raconte les dérives, la déchéance, la solitude des nuits passées sous un carton, la faim, et cette impression de saleté permanente. Aucun voyeurisme dans la démarche de l’écrivaine, mais un constat implacable et, surtout, cette envie de nous aider à surmonter les clichés sur les sdf. Fatiha Saidi ne se contente pas de raconter son expérience, elle a également fait un travail de recherches pour expliquer ce qui existe pour leur venir en aide, les chiffres de la précarité et les rares solutions qui existent pour les soutenir. A l’heure du couvre-feu, leur situation déjà difficile a encore pris un coup : moins de passage, moins de petites pièces laissées dans un gobelet, les restaurants fermés, une source de nourriture qui s’est tarie,… sans oublier cette aberration : ils doivent à l’heure actuelle montrer patte blanche pour ne pas être verbalisés d’être dans la rue après 22 heures. Insupportable cynisme. Pour répondre à la question Comment réagir face à la mendicité, lisez ce livre qui, non content d’apporter des réponses reversera l’intégralité de ses droits d’auteur à l’association Resto du Cœur de Namur.

Dans la peau d’une femme mendiante, Fatiha Saidi, La boîte à Pandore éditions, 18,90 €.