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©Invitation to Lindy Hop, Douglas W. Gorsline (1913-1985). Crédit: Smithsonian American Art Museum

MetroBoulotSexo
Dirty Dancing

Didier Dillen -

 DANSE et DRAGUE ! À la fin du XIXe siècle, les Belges découvrent le bal populaire et les rapprochements très charnels qu’il autorise. Ça ne plaît évidemment pas à tout le monde. Qui, de la morale ou du libertinage, a fini par mener la danse?

 

À partir de la fin XIXe siècle, les bals populaires chers à Sardou prennent le relais des fêtes patronales et des kermesses comme lieu de rencontre entre filles et garçons.

Les débuts sont difficiles. Dans un certain nombre de communes, ces bals publics sont interdits sauf autorisation expresse du bourgmestre… et paiement de taxes ! Ailleurs, ils sont organisés dans les moindres détails pour éviter les débordements de la chair. Ici, on réserve la première danse au Capitaine de la Jeunesse et sa cavalière officielle, là au curé du village ! Mais avec les bals, la drague change de visage. Le garçon qui flashe sur une demoiselle s’arrange pour l’inviter un peu plus souvent que les autres.

En Flandre, la jeune fille qui ne dit pas merci après un premier pas de danse fait savoir à son cavalier qu’elle ne serait pas contre une deuxième invitation. Trois tours de piste sans un merci, et voilà le garçon invité mine de rien à raccompagner la belle chez elle après la soirée, comme il est d’usage !

Turpitudes populaires

La danse n’est d’ailleurs pas aussi innocente qu’elle peut paraître. Elle facilite les rapprochements corporels entre les sexes, à une époque où ceux-ci sont sévèrement limités. La valse, qui à ses débuts fait d’ailleurs scandale, servira semble-t-il de première expérience érotique à bien des couples. Et s’il n’y avait encore que la valse. Certains pas de danse mettent les esprits chagrins au supplice. On voit la tentation et le démon dans le moindre déhanchement, dans le plus petit frôlement des corps.  Hélas, il faut bien reconnaître, déplore, entre autres, un curé flamand des années 30, que certaines danses récemment introduites, même au sein de la meilleure société, ne sont que l’expression éhontée et l’incarnation de la plus grande lascivité. Je n’en mentionnerai que quelques-unes sous leur nom : le tango, le fox-trot, le one-step, le charleston etc. Ces danses sont empruntées aux turpitudes populaires les plus primitives… Elles exigent des danseurs des mouvements, des postures, des rapprochements, des tournoiements, des contacts étroits, qui ne sont que de purs péchés. Que n’aurait-il dit pu dire d’une salsa !

Interdit aux moins de 18 ans !

Loin de s’estomper, ces sentiments vont reprendre de plus belle à la Libération. À cette époque, les nouveaux loisirs adolescents, danse, cinéma, sorties entre copains, sont vus d’un mauvais œil par une palanquée de pédagogues et de moralistes. La danse surtout inquiète. Pensez donc, on virevolte désormais partout et à tout moment. Non seulement dans les bals, les dancings, mais aussi dans les arrières salles des cafés ! Or, dans une Belgique  » socialement et moralement guindée « , gambiller innocemment est censé mener irrémédiablement au sexe ! La danse stimule, dit-on, les zones érogènes, provoque des sensations plus excitantes encore qu’une relation sexuelle ! Devant ce scandale, un projet de loi, dit de préservation morale de la jeunesse, est déposé en 1947 au Parlement. Il ne prévoit rien moins que l’interdiction des dancings aux moins de 18 ans ! Fortement contesté, il ne fut finalement voté qu’en 1960, et ne tardera pas à être détourné d’une façon ou d’une autre. Cette loi assurera aussi le succès phénoménal des surprises-parties et autres surboums !

 

Extrait du livre L’histoire amoureuse des Belges, éditions Jourdan, 17,90 €.

Lisez aussi Les Erotiques de l’histoire, Didier Dillen, éditions Jourdan, 15,90 €.

 

Disponible sur notre BAZAR e-SHOP

 

Retrouvez toutes les semaines la rubrique MetroBoulotSexo, un regard espiègle et toujours bien documenté sur ce qui se passe généralement sous la ceinture, par Didier Dillen du blog Love,Sexe etc