John Van Oers est un minimaliste, mais pas un minimaliste cérébral. Ses sculptures en carton, plâtre, bois ou en bronze, à première vue en disent peu, juste ce qu’il faut pour titiller l’imagination. On y trouve des bâtiments, des paysages ou des éléments architecturaux réduits à des formes simples. Toutes ces formes sont liées à ce que l’artiste anversois appelle les Very Important Buildings. Des constructions directement liées à un moment de sa vie, à une perception, une vision fugace, une émotion.
Se considérant comme un architecte frustré, il a toujours été fasciné par cet art où il voit une métaphore des liens entre les gens, ou entre la ville et le paysage. Dis-moi comment tu habites, je te dirai qui tu es. Dans son studio à Borgehout, il accumule toutes sortes de matériaux qu’il assemble parfois comme un rébus sculptural. Mon atelier est comme un terrain de jeu. J’aime jouer avec le contraste entre des matériaux très ordinaires comme le MDF et le bronze. Des pièces peuvent être inachevées et il peut passer parfois deux ou trois ans avant qu’il leur trouve le bon contexte.
L’homme pratique un humour décalé, jouant à égarer le spectateur devant ce qu’il croit reconnaître. La pièce intitulée The Basement (le sous sol) semblable à une maison de Monopoly avec son petit volume ventral relié par un escalier n’est autre que la sinistre maison de Marc Dutroux où l’artiste a mis en évidence ce que le pervers a cherché à cacher. Je raconte parfois des choses terribles sous un bel emballage. L’artiste ne peut pas sauver le monde, juste apporter un peu de controverse, comme parfois la musique.
Au fil des pièces, on découvre des piscines, des maisons de plage, un bateau de plaisance, biens de consommation que l’artiste souligne n’avoir jamais possédé. Je me souviens des dépliants pour la Saint-Nicolas que je recevais à la maison. « Si quelque chose te fait envie » me disait mon père, découpe l’image comme ça, tu pourras te dire que tu l’as. Rien n’égale le pouvoir de l’imagination.
Il y a beaucoup de pièces qu’il est seul à vraiment comprendre. Quand il dit J’aime les horizontales et les verticales, il a l’impression d’avoir tout dit. Il place ses cailloux blancs, au spectateur à reconstituer le chemin.
Il y a quelques années, il a réalisé des œuvres pour un institut de soins psychiatriques anversois. Des séries de cinq sculptures au sujet simple qui n’avaient à première vue rien à voir l’une avec l’autre. Des ébauches de scénarios. En attendant son tour, il vaut mieux laisser travailler son imagination plutôt que de lire une revue périmée. J’aime ce qui ressort des jeux d’association, le résultat est toujours mystérieux.
John Van Oers, Shorts Cuts, jusqu’au 5 mars, RossiContemporary, Rivoli Building, 690 Chaussée de Waterloo, 1180 Bruxelles