Les deux artistes se renvoient les images dans une double exposition de peintures, collages et sculptures en équilibre entre la vraisemblance et les faux semblants.
A La Louvière, flotte un petit air de surréalisme. Un petit quelque chose qui tire le tapis sous les images et franchit les chemins de traverse avec un brin d’humour. François Liénard et Daniel Daniel, les deux artistes présentés en duo au Château Gilson ne se réclament pas du courant surréaliste, mais on peut trouver dans les collages de l’un et dans les peintures et sculptures de l’autre, la logique des rencontres improbables et de l’onirisme poétique de ces corsaires des mots et des images.
Le respect illusionniste
François Liénard aime beaucoup la peinture, mais pratique le collage. Il prétend que c’est parce qu’il n’a jamais eu d’atelier et qu’avec une table de cuisine, une paire de ciseaux, un tube de colle, c’est ce qu’il peut faire de mieux. On lui laisse le bénéfice du doute puisqu’on est enchanté par le résultat. Histoire de ne pas perdre l’oeil de son spectateur, il privilégie le format carte postale, propre et net, sans fioritures. S’il aime la rencontre d’univers qui n’avaient rien à faire ensemble, il organise ces rendez-vous dans le respect illusionniste de la lumière et la perspective. A première vue, tout a presque l’air normal sauf qu’un élément vient discrètement déstabiliser la logique de l’image. L’histoire de l’art est son sujet de prédilection, on voit ainsi un escargot prendre son temps chez Vermeer ou un coup de brosse de Lichtenstein débouler sur un village de Breughel. Parfois, il ne change qu’un élément comme quand ce dandy affublé d’une tête de Christ devient un hipster accoudé en retrait dans un cocktail mondain, celui qui rumine dans son coin. Nourri de culture populaire, Liénard s’amuse aussi à provoquer des rencontres inattendues entre art majeur et art mineur avec un Astro Boy qui pulvérise un Kandinsky, Bob et Bobette en visite dans l’atelier de Velasquez ou les Tuniques bleues qui s’invitent chez Vincent Van Gogh.
Egalement poète et éditeur à ses heures, le natif du Borinage expose quelques-uns de ses objets poétiques et des publications des L.E.Q.C.D.N.A.C.P. (Les Editions Qui Changent De Nom A Chaque Parution).
Tout est possible
Daniel Daniel trouve son inspiration dans les séries Z, les distorsions du rock qui tachent et dans les trains fantômes. C’est sûr que notre homme doit avoir un abonnement à vie au BIFF. Il nous montre une série de peintures où d’inquiétantes créatures se tapissent dans de sombres forêts et d’humides manoirs. Ses sculptures au charme patiné n’auraient assurément pas usurpé leur place dans le décor d’une baraque foraine, là ou tout est possible. Quand la grosse tête de son voisin prend une teinte de papier mâché et commence à rouler des yeux et quand les sapins du petit bosquet se couvrent de têtes ricanantes.
Avant de quitter les lieux, il ne faut surtout pas manquer le formidable court-métrage The Sapinière of love, mélange de prises de vue et animation où un drôle de montagnard en ballade en forêt visite une galerie souterraine aux tableaux étrangement vivants. Comme quoi, on a toujours quelque chose à apprendre de nos amis les conifères.
François Liénard – Daniel Daniel
Duo
Ils n’en font qu’à leur tête
Château Gilson
11 rue de Bouvry
7100 La Louvière
jusqu’au 6 juin 2021
ouvert le samedi et dimanche de 14 à 18h
www.cestcentral.be