Mots de passe?
Le bitume a son langage ! Des mots de passe en quelque sorte. Pas l’argot des petits voyous, des truands de haut vol. Non, celui des filles de joie, de leurs clients et de leurs julots casse-croûte(*), la trinité pas toujours très sainte du monde de la prostitution. Ce vocable truculent, parfois poétique, parfois très cru, témoin d’une réalité souvent sordide, fut plus d’une fois mis à contribution dans la littérature ou au cinéma. Les mots de cette langue doublement verte ont par ailleurs nourri la langue populaire. Certains ont même poursuivi leur carrière jusque dans le français du quotidien ! Sait-on par exemple que le mot naze est à l’origine un terme de l’argot prostitutionnel qui désigne une fille syphilitique ?
Escaladeuse de braguette
Des expressions pour désigner ces reines du trottoir que sont les prostituées, il y en a d’ailleurs une flopée : escaladeuse de braguette, fleur de pavé, voyageuse sans bagages (dans les aéroports), marcheuse… Pierre Merle, dans son Dictionnaire de l’argot de la prostitution en recense au moins une vingtaine ! L’abatteuse, par exemple, est une sorte de stakhanoviste de la passe. On la surnomme parfois ascenseur, parce qu’elle monte et descend sans arrêt ! Rien à voir avec l’étoile filante, la pute occasionnelle qui déserte le trottoir aussi vite qu’elle y est apparue, et encore moins avec la michetonneuse sa cousine par alliance, prostituée totalement amateur qui ne dédaigne pourtant pas faire le tapin à l’occasion. Pour bon nombre de professionnelles, cette michetonneuse aurait tendance à travailler à l’amoureuse. Lisez, à mettre un peu trop d’application dans ses passes ! La tricoteuse est quant à elle une adepte du service de livraison à domicile, alors que l’amazone officie plutôt dans sa propre voiture. Lequel véhicule est quelques fois une camionnette spécialement aménagée, auquel cas on dira de la dame en question qu’elle travaille à la bougie ou qu’elle fait la bougie. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elle signale sa disponibilité en plaçant une bougie, ou une lampe, allumée sur son tableau de bord !
Le fils de la repasseuse
Au détour des allées boisées, le cave, le miché, le micheton, le client quoi, croisera peut-être aussi de façon tout à fait… involontaire quelque superbe Brésilienne-rasoir, travesti brésilien ou supposé tel, devenu Brésilienne suite à une opération qui n’a rien à voir avec celle du Saint-Esprit. Les autres prostituées disent souvent des Brésiliennes-rasoir qu’on leur a… coupé le téléphone ! Du client justement, parlons-en. Il peut s’agir d’un furtif porte-cochère, amateur de coït express, d’un fondu, adepte des traitements spéciaux, du plus classique BPF (bon père de famille), ou du non moins classique apéro, reconnaissable à ses petites habitudes horaires : toujours au moment de l’apéritif, d’où son nom ! Une heure où il y a souvent du monde sur la corde à linge ! Habitués ou non, tous ces messieurs viennent pour se dérouiller le piston, détacher le plâtre (se faire pratiquer une fellation à fond), et plus généralement se faire essorer les glandes. Et aussi le portefeuille ! Enfin pas tous. Certains se transforment parfois en kangourou et hésitent longtemps devant la marchandise, les mains dans les poches, tandis que d’autres jouent carrément les fils de la repasseuse, et vont et viennent sans jamais pouvoir se décider. Bande de casstrav’ (casse travail) va !
(*) Petit proxénète sans envergure
À lire :Mots de Passe. Dictionnaire de l’argot de la prostitution. Pierre Merle. Ed. Favre. 18,25 €
Plus d’anecdotes coquines dans le livre Les Erotiques de l’histoire, Didier Dillen, éditions Jourdan, 15,90 €. Disponible sur notre Bazar Store
Lisez aussi L’histoire amoureuse des Belges, Didier Dille, éditions Jourdan, 17,90 €. Disponible sur notre Bazar Store.
Retrouvez toutes les semaines la rubrique MetroBoulotSexo, un regard espiègle et toujours bien documenté sur ce qui se passe généralement sous la ceinture, par Didier Dillen du blog Love,Sexe etc
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