Colin Delfosse est un photographe documentaire qui s’en va à travers le monde tirer le portrait et raconter une autre réalité. Ses photos sont construites à l’image de ces architectures fastueuses en RDC, maintenant dévastées par la brousse : en force lumineuse et élégance sobre. Il publie beaucoup, s’expose souvent et se livre, un peu.
J’étais à Kinshasa lors des élections en 2011. C’est une ville très dense de près de 12 millions d’habitants. Ce n’était pas facile de prendre des photos. Les gens venaient manifester leur désaccord avec le résultat des élections. Le climat était hyper tendu, il y avait un réelle insécurité.
On a gardé, qu’on le veuille ou non, un lien affectif avec le Congo. Même si cela n’a plus grande influence sur la politique congolaise ou sur l’économie belge. J’aime toujours retourner au Congo, il y a une énergie fantastique qui se dégage des gens et des lieux.
On a gardé, qu’on le veuille ou non, un lien affectif avec le Congo. Même si cela n’a plus grande influence sur la politique congolaise ou sur l’économie belge. J’aime toujours retourner au Congo, il y a une énergie fantastique qui se dégage des gens et des lieux.
Quand on est belge et photographe, il y a toujours un moment où l’on nous propose de partir au Congo, pour la simple raison que ce fut notre seule colonie. Lorsque la presse et le milieu associatif belges parlent de l’Afrique, ils mentionnet d’abord le Congo.
J’ai pris cette photo lors d’un match de catch sur un terrain vague près de Kinshasa. Les catcheurs congolais sont l’émanation la plus vive de la folie quotidienne de cette ville étourdissante. C’était de la folie, des masses de gens, beaucoup d’enfants, fascinés par le combat dans une atmosphère très forte.
J’ai pris cette photo lors d’un match de catch sur un terrain vague près de Kinshasa. Les catcheurs congolais sont l’émanation la plus vive de la folie quotidienne de cette ville étourdissante. C’était de la folie, des masses de gens, beaucoup d’enfants, fascinés par le combat dans une atmosphère très forte.
En 2015, j’ai publié un livre, Toute arme forgée contre moi sera sans effet, sur les catcheurs congolais. Ce sont des amateurs de culturisme ou de magie noire, qui se disputent la gloire sur des rings de fortune et créent des personnages hybrides, mi-athlètes, mi-sorciers en donnant une place importante aux symboles magiques traditionnels, comme les fétiches. Ce brassage de cultures populaires est fascinant.
On investit évidemment personnellement pour ses reportages au départ . On fait surtout des photos pour soi-même, pour l’aventure et tout ce que cela provoque en soi. Et puis, bien sûr, on espère aussi susciter l’intérêt des gens en livrant un documentaire personnel qui montre une certaine réalité du pays.
On investit évidemment personnellement pour ses reportages au départ . On fait surtout des photos pour soi-même, pour l’aventure et tout ce que cela provoque en soi. Et puis, bien sûr, on espère aussi susciter l’intérêt des gens en livrant un documentaire personnel qui montre une certaine réalité du pays.
J’étais au Rwanda, en 2012, pour une commande presse sur les courses cyclistes lorsque le M23 a pris la ville de Goma. J’ai passé la frontière et fait quelques reportages pour des ONG, le CICR et le UNHCR, et la presse – Le Monde et l’Echo notamment. J’ai passé du temps avec les militaires et un groupe armé du M23 pour avoir deux points de vue. Le M23 voulait qu’on parle d’eux et ils n’ont pas hésité à m’emmener en patrouille avec eux, près de la Rwindi.
En parallèle, j’ai commencé mon travail personnel sur l’héritage de Mobutu et suis retourné plusieurs fois en RDC. depuis. En général, je n’organise pas grand-chose avant mon voyage. Au départ, j’ai une idée de mon sujet, et je module en fonction des rencontres. D’autres thématiques surviennent souvent au fil des rencontres pendant les reportages.
En parallèle, j’ai commencé mon travail personnel sur l’héritage de Mobutu et suis retourné plusieurs fois en RDC. depuis. En général, je n’organise pas grand-chose avant mon voyage. Au départ, j’ai une idée de mon sujet, et je module en fonction des rencontres. D’autres thématiques surviennent souvent au fil des rencontres pendant les reportages.
L’ONG Première Urgence m’a commandé un reportage sur la crise humanitaire qui frappe les déplacés du Katanga. L’exposition Out of Home tourne encore actuellement. Ce sont les expositions qui me permettent de gagner ma vie. C’est un investissement de départ, financier, émotionnel et organisationnel, mais ensuite les photos circulent et je touche les droits d’utilisation pour la location de l’exposition. Au départ, je visais surtout les publications dans la presse, mais il faut tellement se battre que cela devient décourageant. Un livre, c’est merveilleux mais ce n’est pas rentable. Les éditeurs demandent une participation financière à l’auteur, il faut pouvoir se le permettre.
Au Katanga, j’ai trouvé plusieurs lieux improbables venant de l’héritage de Mobutu. Ici, cet homme, devenu fou après un accident à la mine, s’est installé dans les ruines d’une ancienne villa coloniale, dans le quartier de Makomeno.
Au Katanga, j’ai trouvé plusieurs lieux improbables venant de l’héritage de Mobutu. Ici, cet homme, devenu fou après un accident à la mine, s’est installé dans les ruines d’une ancienne villa coloniale, dans le quartier de Makomeno.
J’ai toujours fait des portraits, à la chambre technique entre autre, même pendant les conflits au Kivu avec le M23. Les journalistes occidentaux ont rarement des problèmes là-bas, quoique maintenant il commence à y avoir du rançonnage. J’ai été invité au mariage d’un militaire et je suis tombé sur cet enfant de cœur, Clémence. Tout le monde va à l’église au Congo. Ils prient tous, je crois que les rites traditionnels sont parfois mal vus. Pour les cérémonies, ils mettent leurs plus beaux habits, et sont fiers de véhiculer cette image positive d’eux.
Ce travail a fait l’objet d’une exposition au Botanique en 2013, Dancing Ashes et est visible en France pour l’instant. Je vends parfois des tirages, même si ce n’est pas le but premier, mais c’est une partie non négligeable de mes revenus.
La sidérurgie de Maluku, près de Kinshasa, est l’un des « éléphants blancs » de Mobutu. La construction de l’usine, a coûté 230 millions d’euro, a pris dix ans, et a fonctionné cinq ans. On pense aussi aux palais de Mobutu, et à sa ville Gbadolite, son projet de communication satellite jamais abouti, le stade des Martyres, et le programme spatial, où il y a quand même eu deux tests d’envois de fusée par les Allemands. Mobutu ne s’est pas occupé de son peuple, le pays n’était pas dirigé et c’est maintenant l’un des pays les plus pauvres du monde paradoxalement avec des richesses inouïes. De plus, il est entouré de pays en conflit et accueille des populations de réfugiés sur toutes ses frontières de l’est et du Nord.
Le travail du journaliste est évidemment très solitaire. J’ai besoin de partager, confronter, élaborer avec les membres de mon collectif (Out of Focus), ou avec les journalistes de Medor, c’est essentiel pour moi.
Le travail du journaliste est évidemment très solitaire. J’ai besoin de partager, confronter, élaborer avec les membres de mon collectif (Out of Focus), ou avec les journalistes de Medor, c’est essentiel pour moi.
Mon travail sur l’héritage de Mobutu sera exposé au Brass à Bruxelles en mai. Ce sont de très grands tirages mis en valeur par ce lieu majestueux. J’ai voulu montrer les ‘vestiges’ de cette époque zaïroise fastueuse et faire des portraits des personnalités qui ont participé à l’épopée de Mobutu. Comme ce portrait posé à son domicile de Masamba Toukala Kiese, menuisier charpentier qui a construit un palais pour Mobutu. Le jour de l’inauguration, le président lui a remis la médaille du mérite. « Mobutu était un homme bon et mauvais à la fois : s’il appréciait ton travail, il te couvrait d’argent. Mais dès que tu lui déplaisais, cela tournait très mal »
Voir ou revoir d’autres PhotoSynthèses : Sébastien Van Malleghem, Sandrine Lopez, Marie Sordat.