Art ‘n roll, baby
Lexpo Rebel Rebel est finie, en voici le livre!
Le rock et l’art. Deux miroirs de la société contemporaine. Le rock influence certains artistes et inversement. Deux cultures foisonnantes qui retrouvent chez l’autre ce qu’elles n’ont pas. Du rock les artistes extraient la jeunesse, comme un élixir, et puisent dans cet inconscient collectif qui incarne la révolte et le refus de la norme; dans l’art, les musiciens puisent la créativité et des univers visuels et poétiques qui s’affranchissent du réel.
Le gros livre qui accompagne l’exposition n’est pas un catalogue où alors il serait le catalogue de l’exposition que Denis Gielen aurait rêvé faire. De nombreux artistes et musiciens présents dans ces pages étaient absent des cimaises du Grand Hornu.
Entre une très belle photo de l’écrivain Neal Cassady devant un juke-box en 1962 et celle d’un passager de l’Eurostar dissimulé derrière la une du Times annonçant la mort de Bowie, ce sont plus d’un demi siècle d’influences mutuelles et croisée entre deux univers pas du tout cloisonnés. Le livre n’est pas une énième histoire du rock mais plutôt une relecture subjective de cette histoire à travers le regard des artistes.
Toute la richesse de la culture rock tient aux multiples croisements d’une généalogie bâtarde qui foisonne de productions hybrides, écrit-il, en poursuivant que comme l’histoire de l’art, la culture rock est peuplée de fantômes curieusement visibles et audibles.
Pour évoquer et ordonner ces ensemencements tantôt critiques, tantôt complices, Gielen a choisi trois thématiques liées au rock, le folk pour évoquer les racines vernaculaires, le glam, en miroir de la théâtralité et le punk, décharge de révolte contre les conformismes sociaux. Quand on dit racines, il ne faut pas y voir la quête des origines mais la résurgence de ce que le rock peut dégager d’authentique, de tribal, primitif, voire parfois étrange.
La théâtralité était présente dès les origines dans le costume lamé d’Elvis ou l’extravagance éruptive de Little Richard. Elle trouve sa cour des miracles avec Warhol et toute la faune de la Factory et son carnet de style dans les codifications vestimentaires des bandes.
Le punk a été un indispensable coup de balais dont le livre retient au delà de l’inévitable Malcom McLaren les croisements artistiques autour de la scène new-yorkaise des années 80. Le parcours s’achève par quelques allusions au street art et au graph. Parce qu’il faut bien une fin.
Il est à noter que comme les musiciens évoqués, les artistes sont pour la plupart des blancs caucasiens issus de milieux aisés. Si cela n’enlève rien à la justesse et à l’intérêt des propos, cela ouvre les pages à d’autres analyses, à d’autres rencontres entre art et musique populaire. Richement illustré, l’ouvrage propose une chronologie bicéphale, mais pas de listes d’écoute. Pour cela, on peut faire confiance à la curiosité du lecteur et aux joies du surf.
Rebel Rebel : Art + Rock, Denis Gielen, Fonds Mercator, 304 pages, 39,95 €