Il fut un temps où le voyage vers les colonies signifiait un saut vers l’inconnu et vers un monde plein de dangers et de félicités. Le dessinateur belge Olivier Schrauwen raconte l’histoire fantasmée de son grand-père qui un beau jour de 1947 a pris le bateau à Anvers pour le grand ailleurs.
L’histoire
Très vite, le voyage part en sucette. Arsène, jeune homme peu sûr de lui, rencontre un étrange vieil homme qui le met en garde contre les dangers du vers-éléphant, un invertébré minuscule capable de ravager l’intérieur du corps humain et susceptible de se propager dans les liquides les plus communs que sont l’eau du robinet, de rivière, de pluie ou même les larmes.
Sur place, il est accueilli par son cousin et son épouse, la désirable Marieke. Les jours et les rencontres se succèdent dans l’imprévisible absurdité des rêves. Arsène n’en mène pas large, hanté par la menace des parasites, il en est réduit à sceller ses sous-vêtements et se laver à sec en attendant son départ pour Freedom Town, la ville aux improbables formes dadaïstes que son fantasque hôte rêve de construire en pleine jungle.
La forme
Cette BD hors norme est servie par un dessin assez curieux aux traits résolument pop qui semblent parfois être extraits d’un vieux manuel de scoutisme ou d’un mode d’emploi pour une maison préfabriquée. La bichromie bleu et rouge aux encres délavées qui alterne comme des lumières clignotantes vient encore renforcer cette sensation vintage.
L’effet
Le plaisir vient d’un récit envoûtant plein de surprises et du décalage entre le dessin assez inexpressif et les textes à l’humour pince sans rire qui ne sont pas sans rappeler l’univers décalé d’un Glen Baxter. Dans ce cadre très codifié, Olivier Schrauwen fait preuve d’une constante inventivité graphique en changeant le rythme et la distribution des cases ou en s’amusant à dessiner au premier degré des métaphores et expressions verbales.
Arsène Schrauwen, Olivier Schrauwen, L’Association, 257 pages, 35€, disponible sur BAZAR e-Shop